Prescription infirmière libérale : que peuvent prescrire les IDEL ?
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Ah, la fameuse question ! Celle qu’on se pose entre deux pansements ou au moment de sortir le carnet de prescription : « Et ça, j’ai le droit de le prescrire ? ». Depuis le 31 mars 2012, le droit à la prescription infirmier libéral a évolué, offrant plus d’autonomie aux IDEL… mais avec un cadre précis à respecter.
Cet article va vous aider à mieux soigner et coter. Que vous soyez fraîchement installé(e) ou déjà bien rodé(e), il est toujours bon de faire le point sur ce que vous pouvez prescrire, dans quelles conditions, et comment le faire dans les règles de l’art (sans y passer la soirée). On vous parle des dispositifs médicaux, vaccins, substituts nicotiniques, contraceptifs, mais aussi facturation et rédaction d’ordonnances.
Critères et conditions
Voici les critères et conditions essentiels pour qu’une infirmière libérale (IDEL) puisse exercer son droit de prescription :
En général, une infirmière ou un infirmier libéral, qu’il soit titulaire ou remplaçant, dispose d’un droit de prescription pour certains dispositifs médicaux. Ce droit est encadré par la législation, notamment le Code de la Santé Publique et l’Arrêté du 20 mars 2012.
Pour pouvoir prescrire des dispositifs médicaux, une IDEL doit remplir plusieurs conditions principales :
- Elle doit agir pendant la durée d’une prescription médicale ou d’une série d’actes infirmiers.
- Elle doit agir dans le cadre de sa compétence.
- Il ne doit pas exister d’indication contraire du médecin.
- Les dispositifs médicaux prescrits doivent être inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables (LPPR) par l’Assurance Maladie. Si un dispositif n’est pas remboursable, l’infirmière doit noter « NR » sur l’ordonnance.
L’Arrêté du 20 mars 2012, qui fixe la liste des dispositifs médicaux que les infirmiers sont autorisés à prescrire, prévoit deux cas de figure:
Prescription sans autorisation spécifique du médecin : Dans ce cas, l’IDEL doit remplir les trois conditions générales mentionnées ci-dessus pour prescrire certains dispositifs médicaux inscrits à la LPPR. La liste inclut notamment des articles pour pansements, des dispositifs pour le traitement de l’incontinence et l’appareil urogénital, des dispositifs pour perfusion à domicile, et des cerceaux pour lit de malade.
Prescription avec information préalable du médecin traitant : En plus des trois conditions générales, l’IDEL doit informer au préalable le médecin traitant désigné par le patient. Ce cas concerne d’autres dispositifs médicaux inscrits à la LPPR, tels que certains matelas et coussins pour la prévention des escarres, certains pansements spécifiques (hydrocolloïdes, hydrocellulaires, etc.), les sondes naso-gastriques/entérales, et, dans le cadre d’un renouvellement à l’identique, les orthèses élastiques de contention et les accessoires pour lecteur de glycémie. Pour le renouvellement à l’identique, la prescription médicale initiale doit dater de moins d’un an et la quantité ou la longueur ne peut pas être modifiée.
Il existe également des cas particuliers :
Renouvellement des contraceptifs oraux : Une IDEL est autorisée à renouveler les ordonnances de contraceptifs oraux sous conditions. L’ordonnance initiale doit dater de moins d’un an, le contraceptif ne doit pas être sur une liste d’exclusion (en attendant sa publication, tous les médicaments contraceptifs oraux remboursables et disponibles en ville sont concernés), et le renouvellement par l’IDEL est pour une durée maximale de 6 mois, non renouvelable.
Prescription de vaccins : Depuis avril 2022, l’IDEL peut vacciner certains patients sans prescription médicale préalable pour une liste élargie de vaccins (grippe saisonnière, diphtérie, tétanos, poliomyélite, coqueluche, etc.).
Prescription de substituts nicotiniques : Les infirmiers peuvent prescrire des substituts nicotiniques (patch, gomme, pastille…).
Autres renouvellements : Les infirmières peuvent renouveler les prescriptions de solutions et produits antiseptiques ainsi que de sérum physiologique.
Lors de la rédaction de la prescription, qu’elle soit manuscrite ou informatisée, l’ordonnance infirmière doit impérativement contenir des informations spécifiques : l’identification complète de l’infirmière prescriptrice (nom, adresse, profession et numéro ADELI/RPPS), l’identification du patient, le nom et la quantité des dispositifs prescrits, l’utilisation, la répétition, la mention « ALD » ou « Accident de Travail » si applicable, la date et la signature. Le numéro ADELI est progressivement remplacé par le numéro RPPS. S’il s’agit d’un renouvellement infirmier, la mention « renouvellement infirmier », la durée en mois du renouvellement et la date doivent également figurer. Une prescription pour dispositifs médicaux ne peut excéder 12 mois.
Enfin, il est souligné que la maîtrise du cadre législatif et des bonnes pratiques de prescription est cruciale, et suivre une formation sur la prescription infirmière est recommandé pour cela. Une IDEL remplaçante peut prescrire si elle possède son propre numéro RPPS, bien qu’elle ne puisse pas facturer ces actes en son nom propre. L’acte de prescription en lui-même ne se cote pas.
Prescription infirmière libérale : ce que l’on peut vraiment prescrire en première intention (et pourquoi c’est bon à savoir) 
Quand on parle de prescription infirmière libérale, il est essentiel de savoir ce qu’on peut prescrire en première intention c’est-à-dire sans avoir besoin d’une autorisation spécifique du médecin et ce qui demande un petit détour par la case coordination. Une subtilité qui peut éviter bien des allers-retours inutiles et quelques soupirs de frustration.
Ce que les infirmiers libéraux peuvent prescrire en première intention.
Bonne nouvelle : les infirmiers et infirmières libéraux ne sont pas réduits au simple rôle d’exécutants. Ils peuvent bel et bien prescrire certains dispositifs médicaux, à condition de respecter quelques règles de base :
intervenir dans le cadre d’une prescription médicale ou d’une série d’actes infirmiers,
rester dans leur champ de compétences (on ne se transforme pas en chirurgien du jour au lendemain),
s’assurer qu’aucune contre-indication du médecin ne s’y oppose,
et bien sûr, que les dispositifs soient inscrits sur la fameuse LPPR (la liste des produits et prestations remboursables).
L’Arrêté du 20 mars 2012 est là pour poser le cadre. Il précise notamment les situations dans lesquelles un(e) IDEL peut prescrire sans avoir besoin d’un feu vert explicite du médecin, à condition de respecter les critères cités plus haut.
Voici donc ce qui est prescriptible en toute autonomie :
Articles pour pansements infirmiers
Compresses stériles (adhésives ou non), pansements adhésifs, pansements absorbants pour plaies productives, gaze, coton, sparadraps, bandes, jerseys tubulaires, films semi-perméables, sets pour plaies (seuls les post-opératoires sont remboursés), et même les cerceaux pour lit de malade. Oui, ça aussi.
Dispositifs médicaux pour l’incontinence et l’appareil urogénital
Étui pénien, plat bassin, urinal, poches et accessoires pour stomisés ou incontinents, matériel pour irrigation colique, sondes vésicales (autosondage ou hétérosondage).
Dispositifs pour perfusion à domicile
Appareils et accessoires à usage unique, matériel pour chambre à cathéter implantable ou central tunnelisé, seringues, aiguilles, prolongateurs, robinets, et potences à sérum. Bref, tout l’attirail du parfait petit perfuseur à domicile.
Mais ce n’est pas tout. Depuis avril 2022, les IDEL peuvent également prescrire certains vaccins sans ordonnance préalable du médecin : grippe, diphtérie, tétanos, poliomyélite et quelques autres selon les cas.
Et côté sevrage tabagique, les substituts nicotiniques (patchs, gommes, pastilles…) sont aussi dans la poche, sous certaines conditions de remboursement.
Petite précision importante : il existe aussi une catégorie de dispositifs médicaux inscrits à la LPPR que l’IDEL peut prescrire, mais cette fois avec une information préalable au médecin traitant. On parle notamment de matelas et coussins anti-escarres, de pansements spécifiques, de sondes naso-gastriques ou entérales, ou encore de certains renouvellements d’orthèses de contention ou d’accessoires pour lecteur de glycémie.
Enfin, il ne faut pas oublier que l’IDEL peut aussi renouveler, sous certaines conditions, des prescriptions existantes : contraceptifs oraux (pour une durée de 6 mois max), produits antiseptiques, sérum physiologique. Attention toutefois, ce sont des renouvellements, donc pas à proprement parler des prescriptions de première intention.
Quand on parle de prescription infirmière libérale en première intention, on parle surtout de dispositifs médicaux bien précis (pansements, incontinence, perfusion), de certains vaccins et des substituts nicotiniques. Tout cela sans avoir à décrocher son téléphone pour appeler le médecin à condition bien sûr de respecter les règles du jeu. Pour le reste, mieux vaut garder de bonnes relations avec le généraliste du coin.
Ce que les infirmiers libéraux peuvent prescrire en 2e intention :
Alors, la « 2e intention », qu’est-ce que c’est exactement dans la pratique des infirmiers libéraux (IDEL) ? Pour faire simple, c’est un peu le même principe que la première intention… mais avec une petite marche en plus à monter. Il s’agit ici de dispositifs médicaux inscrits à la LPPR (la fameuse liste des produits remboursables), que l’IDEL peut prescrire à condition de respecter les règles habituelles et de prévenir le médecin traitant du patient. Oui, on reste autonomes, mais pas totalement en roue libre.
Petit rappel des trois conditions de base à respecter pour toute prescription infirmière :
L’infirmier agit pendant la durée d’une prescription médicale ou d’une série d’actes.
Il reste bien dans son domaine de compétences (pas de sortie de piste).
Il n’y a pas de contre-indication du médecin.
Et donc, pour les cas de 2e intention, on ajoute à cela une condition bonus : le médecin traitant doit être informé en amont. Pas besoin d’un roman explicatif, mais un petit message ou une info claire, histoire que tout le monde soit sur la même longueur d’onde.
Voici ce que l’IDEL peut prescrire dans ce cadre un peu plus cadré :
Matériel de prévention des escarres :
Matelas ou sur-matelas en mousse, avec une découpe façon gaufrier (on reste loin du moelleux d’un dessert, mais ça a son importance).
Coussins à air statique, en mousse structurée avec modules amovibles, en gel, ou en mousse et gel. Autant dire qu’il y a du choix pour tous les goûts — et toutes les morphologies.
Pansements spécifiques :
Hydrocolloïdes, hydrocellulaires, alginates, hydrogels, pansements à base de CMC, de charbon actif ou d’acide hyaluronique.
Interfaces, y compris les silicones et celles à base de CMC.
Pansements vaselinés.
Bref, une belle palette pour soigner sans improviser.
Sondes pour nutrition entérale à domicile :
Sonde naso-gastrique ou naso-entérale : à manier avec précaution, mais faisable, toujours dans le cadre prévu.
Renouvellement à l’identique :
Certaines prescriptions peuvent être reconduites par l’IDEL, à condition que la première ordonnance ait moins d’un an et qu’on ne touche ni à la quantité ni à la longueur.
Orthèses élastiques de contention :
bas (jarret, cuisse), chaussettes, et tous les petits suppléments associés.
Accessoires pour lecteurs de glycémie :
lancettes, bandelettes, auto-piqueurs à usage unique, seringues avec aiguilles, aiguilles pour stylo injecteur, réservoirs stériles non réutilisables, embouts perforateurs… Le kit complet du diabétique bien suivi.
Et pour ne pas se mélanger les seringues, il reste toujours utile de consulter la liste détaillée des dispositifs médicaux autorisés, disponible dans l’Arrêté du 20 mars 2012. Un bon réflexe à avoir sous la main, entre deux tournées.
Rédiger une prescription infirmière : mode d’emploi sans prise de tête
Prescrire, c’est bien. Le faire correctement, c’est encore mieux (et franchement, c’est ce qu’on attend de vous). Que vous écriviez à la main, sur ordinateur, sur papier à en-tête ou ordonnancier, il y a quelques éléments à ne surtout pas zapper pour que votre prescription soit valable.
Ce que votre ordonnance doit absolument contenir :
Votre identification complète : nom, adresse, profession, et le fameux numéro ADELI… ou RPPS. Oui, on sait, c’est un peu flou : certaines sources disent que le numéro ADELI ne compte plus, d’autres l’exigent encore. Dans le doute, mettez les deux si vous les avez, et c’est réglé.
Les infos du patient : nom, prénom, sexe, âge. Bref, l’essentiel pour éviter les confusions de casting.
Les dispositifs médicaux prescrits : avec le nom exact, pas de surnoms ou d’abréviations à la va-vite.
La quantité, le mode d’utilisation et le nombre de fois par jour. Précision = tranquillité.
Si nécessaire, ajoutez la mention « Affection de Longue Durée (ALD) » ou « Accident de Travail ».
La date de prescription : indispensable (et non, « aujourd’hui » ne suffit pas).
Votre signature : toujours obligatoire, même si tout est parfait à côté.
Et ce n’est pas fini…
La prescription doit être faite en deux exemplaires : un pour la CPAM, un pour le dossier de soins du patient. Et si vous gérez tout ça de façon numérique, gardez au moins une trace bien rangée dans le dossier médical.
Si vous prescrivez un dispositif non remboursable, pensez à indiquer la mention “NR” juste en face. Ça évite les surprises à la pharmacie.
Durée de validité d’une prescription infirmière pour des dispositifs médicaux : maximum 12 mois. Pas un jour de plus.
En cas de renouvellement (parce que oui, c’est possible)
Vous pouvez renouveler certaines prescriptions (contraceptifs oraux, antiseptiques, sérum phy). Dans ce cas, n’oubliez pas de mentionner :
« Renouvellement infirmier »,
la durée du renouvellement (en mois),
et bien sûr, la date de ce renouvellement.
En résumé, savoir rédiger une ordonnance, c’est un peu comme une bonne transmission de soins : claire, précise, sans zones d’ombre. Et une fois qu’on a le coup de main, ça roule tout seul.
Rédigé par Zoé d’Infimatch
Questions sur les prescriptions par les IDEL
Est-ce qu’une infirmière libérale peut prescrire des médicaments ?
Non, sauf exception très spécifique (comme les substituts nicotiniques ou certains vaccins). Les IDEL ne peuvent pas prescrire des médicaments classiques comme le ferait un médecin. On reste dans le périmètre des dispositifs médicaux autorisés et encadrés.
Peut-on faire une prescription à la main ?
Oui, tant qu’elle est lisible, complète, et respecte les infos obligatoires. L’important, c’est le fond, pas la forme (bon, on évite quand même l’écriture de médecin, hein…).
Le numéro ADELI est-il encore obligatoire ?
C’est là que ça se complique un peu. Techniquement, le numéro RPPS est celui reconnu officiellement aujourd’hui. Mais certaines sources ou systèmes réclament encore le numéro ADELI. Par sécurité, utilisez les deux si possible, vous serez tranquilles.
Dois-je obligatoirement faire deux exemplaires ?
Oui. Un exemplaire pour la CPAM et un pour le dossier de soins du patient (ou une trace claire dans le dossier médical). On ne rigole pas avec les papiers.
Et si le dispositif médical n’est pas remboursé ?
Vous devez impérativement indiquer la mention “NR” à côté du dispositif concerné. C’est simple, mais c’est à faire — sinon, le patient se retrouve avec une mauvaise surprise à la pharmacie.
Puis-je renouveler une ordonnance que j’ai déjà faite ?
Pas exactement. Vous pouvez renouveler certains traitements précis (comme les contraceptifs oraux, solutions antiseptiques, sérum phy), mais uniquement s’ils ont été initialement prescrits par un médecin, et dans les limites fixées (durée max, pas de modification de la prescription, etc.).
Et pour les vaccins ? Je peux prescrire lesquels ?
Depuis 2022, les IDEL peuvent prescrire certains vaccins sans ordonnance médicale préalable, comme ceux contre la grippe, la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, etc. Là encore, mieux vaut consulter la liste officielle régulièrement, car elle évolue.